Call of Terror 3

Dans la région lyonnaise, un énième concert de black metal néonazi

C’est devenu une habitude. Pour la troisième année consécutive (lire ici et là), un concert de black metal néonazi est organisé ce samedi 9 février dans la région lyonnaise.

Toujours la même musique. En février, les néonazis locaux organisent leur festival de musique, en l’occurrence du National Socialist Black Metal (NSBM).

Ce « Call of terror fest III », aura lieu ce samedi 9 février. Comme chaque année, on attend plus de 400 personnes en provenance des quatre coins de la France.

Où vont-ils se donner rendez-vous ? Sur la page Facebook de l’événement, les organisateurs restent toujours aussi flous et parlent d’un concert dans la « région lyonnaise ». Comme d’habitude, ils indiqueront au dernier moment aux participants l’endroit exact où il leur faudra se rendre.

À qui le tour de se faire « gruger » par les organisateurs néonazis ?

Les forces de l’ordre disent ne connaître, elles aussi, qu’au dernier moment le lieu précis de ce type de rassemblement. Ce qui s’était déjà produit pour les tournois de free-fight ou les précédents concerts organisés par la mouvance Blood and Honour, qui est toujours à la manœuvre.

Pour la première édition de « Call of terror », les organisateurs avaient jeté leur dévolu sur la salle des fêtes de la commune de Saint-Genix-sur-Guiers, à 80 km de Lyon, à limite de l’Isère et de la Savoie.
Le maire de la commune reconnaissait dans les colonnes du Dauphiné s’être fait « gruger » puisque la soirée avait été réservée « pour une réunion de motards ».

La deuxième édition s’était déroulée à Bregnier-Cordon, dans l’Ain, à 8 km du lieu du premier concert.

« On aurait tort de les considérer comme de simples admirateurs d’Hitler »

À la suite à la première édition de « Call of terror », nous avions publié le récit d’un participant, un amateur non pas de « NSBM » mais de metal.

Comme d’autres témoins, il décrivait les participants à la première édition de « Call of terror » comme un public de « métalleux » lambda mais qui passait leur temps à faire des saluts nazis. De son expérience de 20 ans de concerts, il tirait cette conclusion :

« Le mouvement NSBM en plein essor est à la mode [dans le milieu black metal, ndlr], radicalement décomplexé et sans retenu. Et ça va pas en s’arrangeant. Avec l’apologie du nazisme, de la violence et de l’intolérance la plus primaire pour certains et beaucoup d’effet de groupe. »

Un autre fan de black metal et auteur d’une lettre d’info confidentielle « Observatoire NSBM » alerte sur le sujet, également sous couvert d’anonymat :

« On aurait tort de les considérer comme de simples admirateurs d’Hitler. Ce sont des néonazis à tendance Folkish. Leur musique est une façon de faire de la métapolitique, de la politique par la pratique culturelle. Et dans le black metal, ils prennent de plus en plus de place. »

La tendance « Folkish » mêle musique metal et mouvement völkisch, courant intellectuel issu de l’Allemagne de la fin du XIXème siècle qui mêlait spiritualité païenne, mythologie germanique et antisémitisme. Les thèmes développés dans leurs textes ne sont pas directement politiques mais portent sur l’histoire, la nature ou les mythes.

Références au nazisme et proximité avec le Bastion social

Au vu de la programmation, le « Call of terror fest III » va se dérouler de la même manière que les deux premières éditions.

Cinq groupes vont se succéder. Parmi ces groupes, on retrouve deux habitués de ce festival néonazi : les Finlandais de Goatmoon, présents déjà en 2017, tout comme les Français de Baise ma hache.

Voici quelques éléments sur trois de ces groupes qui se produiront samedi :

  • Le groupe allemand « Stalhfront » a participé à Night of honour chez Serge Ayoub, le « parrain des skins français », à Berzy-le-Sec. Il était également présent à Asgardrei en décembre dernier à Kiev, un rassemblement NSBM international produit par les paramilitaires du Secteur Droit et du Régiment Azov, du mouvement ultra-nationaliste à la fois organisation paramilitaire et parti politique.

 

  • Question logo, « Vermine » n’est pas mal non plus, avec une croix celtique dans le nom. « Vermine » aime poser armé sur les réseaux sociaux. Il sera sur scène avec un dénommé Famine. Son groupe, Peste noire, a été associée à une démo intitulée « Aryan Supremacy ». Proche du GUD/Bastion social, il a participé à l’inauguration de l’antenne du Bastion social à Clermont-Ferrand avec « Vermine », justement. Il faisait également partie de la rencontre qui avait lieu le lendemain de la première édition du « Call of terror » dans le local du GUD à Lyon, en 2017.

Quel dispositif d’ordre public ?

Cette proximité entre le Bastion social et les néonazis du black metal fait craindre la venue de membres de l’extrême droite radicale lors de l’Acte XIII des « gilets jaunes » à Lyon qui aura lieu, comme chaque semaine, le samedi après-midi, à quelques heures du concert. Et comme chaque week-end, les militants lyonnais du Bastion social appellent à manifester.

Dans une lettre envoyée par mail ce vendredi matin à plusieurs centaines de maires de la région de Lyon et au préfet de région, l’association Agir pour l’égalité « alerte » sur la tenue de ce concert :

« Nous encourageons les maires à prendre, autant que possible, les précautions nécessaires afin d’éviter la tenue de cet évènement sur leur commune, en vérifiant les réservations prévues pour ce week-end dans les salles communales. Nous encourageons également vivement Monsieur le préfet de Région à alerter les maires des environs à être tout particulièrement vigilants sur les rassemblements organisés sur leurs villages durant ce week-end ».

Contactée par Rue89Lyon, la préfecture de Région assure, par la voix de son porte-parole, « suivre cela de près » mais sans savoir où le concert se déroulera :

« Ils jouent sur les limites des départements. Si cela se déroule sur la voie publique, nous prendrons toutes les mesures qui s’imposent. Et si on constate des éléments d’ordre xénophobe ou antisémite, le préfet fera également preuve d’une grande fermeté ».

Dans un communiqué délivré ce vendredi à 17h30, la préfecture annonce « un dispositif de sécurité adapté » au vu de « groupuscules radicaux qui pourraient participer à la manifestation lyonnaise » : davantage de forces mobiles et de contrôles d’identité ainsi qu’un arrêté interdisant la consommation d’alcool sur la voie publique et l’utilisation de feux d’artifice et pétards. « Des mesures d’enlèvement et de déplacement du mobilier urbain seront prises », indique également le communiqué.

Dans l’Ain, un festival de black metal programme des groupes néonazis

Dans l’Ain, un festival de black metal programme des groupes néonazis

SOS Racisme voulait le faire interdire, mais le préfet de l’Ain a validé son maintien. Le Ragnard Rock Fest aura bien lieu malgré la présence de plusieurs groupes néonazis.

Au début du mois de juillet, l’association anti-raciste écrivait au préfet de l’Ain pour demander l’interdiction de la deuxième édition d’un festival de black metal, le Ragnard Rock Fest, qui mêle concerts et animations vikings à Simandre-sur-Suran, du 21 au 24 juillet.

Ce qui pose problème est la présence de plusieurs formations de la scène National Socialist Black Metal (NSBM) parmi la vingtaine de groupes.

SOS Racisme détaille le pédigrée de trois groupes :

  • « Le groupe Graveland a participé au festival italien nommé « Hot Shower » le 2 avril 2016 à Milan. En référence aux méthodes utilisées par le régime nazi durant la Shoah ».
    Dans un interview à Decibel Magazine de 2010, le leader de Graveland précise sa pensée politique. Il affirme notamment que « Nous avons tous besoin de la ségrégation raciale pour préserver notre propre culture et de la spiritualité ». Ou justifie encore l’antisémitisme : « qui vient de l’évaluation de la situation et des activités du lobby juif international politique contemporaine. »
  • « Noktural Mortum est un groupe ukrainien qui s’est récemment produit au soutien de l’organisation ultranationaliste ukrainienne AZOV en 2014 et en 2015. Dénoncée par l’ONU et Amnesty International comme étant coupable de violation des Droits de l’Homme. La symbolique de ce groupe épouse celle du régime nazi. C’est une des raisons pour lesquelles les prestations de ce groupe sont interdites dans divers pays européens ». Dans son répertoire, le vieux groupe a cette chanson « The call of the Aryan Spirit » (« L’appel de l’esprit aryen »). Avec des paroles comme : « Cracher à la gueule des Juifs, les découper en morceaux » (« Spit in jewish faces, cut them into pieces »), comme le relevait le huffingtonpost.
  • « Naer Mataron est un groupe grec qui a pour bassiste le député du parti d’extrême droite Aube Dorée, Giorgos Germenis.

Les antifascistes de Fafwatch Franche-Comté ont également publié un post très détaillé sur ces groupes qui seront présents au Ragnard Fest.
Où l’on apprend notamment que :

  • Les Ukrainiens de Noktural Mortum ont joué en 2014 à un concert organisé pour Pravyï sektor (Secteur Droit – un parti ultranationaliste) et pour le bataillon Azov constitué de miliciens d’extrême droite. Deux autres groupes ukrainiens présents au festival affichent également leur soutien à Secteur Droit.
  • Les Polonais de Graveland, l’un des groupes cultes de la scène NSBM, a été interdit de scène en Allemagne.
  • La boutique grenobloise « Terre Celtique » tenait un stand en 2015 et sera présente en 2016. Son propriétaire est Christian Mollier, un activiste de l’extrême droite iséroise.


« Aucun groupe néonazi »

Dans un communiqué, les organisateurs ont répondu aux accusations des organisations anti-racistes :

« Lors de la première édition en 2015, (avalisée par les autorités locales) Nokturnal Mortum par exemple était déjà présent. Sans créer le moindre problème, ni faire du festival une tribune néo-nazie. 3/4 des membres d’origine (il y a 22 ans) ne sont plus présents et pour cause, les membres actuels étaient des enfants… Pour Graveland, le groupe est actuellement très loin de ces erreurs de jeunesse… Quant à Malpeste, le groupe n’a jamais eu de propos antisémites, racistes. C’est un groupe local. Qui se voit affubler d’une réputation bien nauséeuse. (…) Un humain ne peut-il avoir le droit de se tromper de chemin pour ensuite suivre un chemin de rédemption ? »

Interrogés par France 3 (à 14’25’’ du JT ci-dessous), l’un des organisateurs, Franco Giannelli, se montre catégorique :

« Il y a des groupes qui se revendiquent NSBM. Vous pouvez aller sur Internet et vous aurez les images des concerts. Il y a des svastika partout, des drapeaux nazis, ça « sieg » dans tous les coins. Aucun de ces groupes-là ne sera jamais présent au Ragnard Fest. »

Pourquoi le préfet n’interdit pas le festival

L’argumentaire des organisateurs a visiblement convaincu les autorités. Dans un mail envoyé à SOS Racisme le 13 juillet, le directeur de cabinet du préfet de l’Ain explique pourquoi le festival ne sera pas interdit.

Il commence tout d’abord par détailler les raisons pour lesquelles il aurait pu interdire ce festival :

« L’autorité de police (CE, ord des 9, 10 et 11 janvier 2014, affaire de Dieudonné M’Bala M’Bala) est même fondée à interdire le spectacle afin de prévenir la commission des infractions pénales que sont des propos à caractère antisémite, qui incitent à la haine raciale, qui font l’apologie des discriminations, persécutions et exterminations perpétrées au cours de la 2nde guerre mondiale et sont de nature à mettre en cause la cohésion nationale). »

Au final, le préfet ne retient que la problématique de l’ordre public :

« Ce festival s’est déroulé l’an passé dans de bonnes conditions. »

Le préfet annonce toutefois qu’il a été demandé aux forces de sécurité (gendarmerie et renseignements) de « procéder aux relevés d’infractions de tous actes à caractère raciste et antisémite qui seraient constatés ».

Le préfet n’interdit pas le festival car, explique son directeur de cabinet, il a reçu des engagements. Dans son mail, le représentant du préfet affirme que le comité d’organisation s’est engagé à :

  • « accroître sa vigilance auprès des festivaliers, bénévoles, artisans et commerçants afin qu’aucun produit vendu ne puisse véhiculer une idéologie politique »
  • « expulser toute personne, y compris artiste, qui aurait un comportement inapproprié pendant le festival. Et à signaler son identité à la gendarmerie le cas échéant »,
  • « ce que toutes les chansons des groupes qui se produiront aient été communiquées et vérifiées par le comité d’organisation. Ce dernier étant composé de membres comprenant toutes les langues parlées sur le site du festival. Et à ce qu’aucune ne véhicule d’idée de haine raciale et à tendance politique. De même s’agissant des visuels et des décors ».

Loïc Rigaud, du bureau de l’association « Agir pour l’égalité – SOS Racisme », qui avait écrit au préfet, conteste cette manière de procéder :

« On connaît ces groupes de black metal et leurs propos sont sans ambiguïté. Il faut agir sur ces groupes en les interdisant pour ne pas laisser libre court à la haine des étrangers et à l’antisémitisme. »

Pour leur première édition, les organisateurs regroupés au sein de l’association « La compagnie d’Edoras » avaient annoncé entre 10 000 et 12 000 festivaliers.

Les Masques de la Révolution

Tournée en 2015, un an après la révolution du Maïdan, cette enquête met en lumière le pouvoir des bataillons nationalistes en Ukraine dans les mois qui ont suivi le changement de régime. Elle reconstitue le massacre de pro-Russes à Odessa le 2 mai 2014, en donnant la parole aux protagonistes des deux côtés. Elle montre aussi comment la jeune démocratie ukrainienne tente de se défendre face à cette menace, notamment par l’arrestation d’un membre de Azov au parlement. Elle a été diffusée début 2016 sur Canal Plus, entre autres.

Ukraine, les masques de la révolution
Un film de Paul Moreira
Une production Première Ligne

https://www.youtube.com/watch?v=VLXtWfTcLC4
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https://www.youtube.com/watch?v=VLXtWfTcLC4
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