hors-série de FAF, newsletter consacrée à l’extrême droite

Dissolutions de mouvements d’extrême droite : est-ce que ça sert vraiment à quelque chose ? 

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Dans un téléphone, les policiers trouvent une photo des deux Alexandre qui tiennent un drapeau identitaire « Defend ꑭ Europe ». Alexandre E. y fait un salut de Kühnen, ersatz de salut nazi, tandis que Alexandre H. fait un signe islamiste repris par le Gud. / Crédits : D

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  • GUD 1983

 


  • Juilet 2013 : suite à la mort de Clément Méric dissolutions de Troisième Voie et Jeunesses Nationalistes JNR autours de Serge Ayoub


Affichage GUDard du port du maillot aux couleurs de M8l8t.H : foire du GUD @ Rungis 2015 et Asgardsrei de AZOV @ Kiev 2019

 

Inauguration Bastion Social Clermont – Juillet 2018

 

productions de stickers turbonazi PN+OC+Zouave en Ukraine pour dégradation du mobilier urbain et saccage des rues de Kiev autours de Asgardsrei de AZOV – décembre 2019

 


  • Décembre 2021 : Dissolution des Zouaves Paris

 


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Le crampon réapparaît plus systématiquement en France depuis 2014, suite à l’invasion de la Crimée, liée aux forces néonazies ukrainiennes du bataillon d’AZOV.

Le crampon fait partie du logo (crampon et AK47) du drapeau suprémaciste Defend Europe et de l’ANR (Action Nationale et Radicale) – Indextreme.fr

 


kuhnen

Le salut de Kühnen est couramment utilisé par les hooligans, skinheads, néo-nazis et la grande partie des groupuscules d’extrême droite française. – indextreme.fr

 


  • Gud – Le Jihad blanc, glissement vers une nouvelle radicalité. juillet 2023.

Depuis novembre 2022, le Gud est de retour. En plus du rat et de la croix celtique, symboles emblématiques du Gud, leurs militants se sont approprié un nouveau geste : l’index pointé vers le ciel. […]

[…] le Gud mène régulièrement des actions qu’il revendique sur les réseaux sociaux. Néanmoins, sur leurs photos de “propagande”, un nouveau geste apparaît : l’index pointé vers le ciel. Ce geste n’est pas une invention de l’extrême droite nationaliste révolutionnaire, mais plutôt un symbole associé aux idéologies intégristes islamistes.

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Si le geste fait partie de la religion musulmane et symbolise “l’Unicité avec Dieu”, il est inoffensif dans son contexte d’origine. Néanmoins, après les interventions d’Oussama ben Laden dans les années 90, l’index pointé vers le ciel, adopté pour renforcer l’image d’une Al-Qaïda unie, est devenu un symbole de ralliement aux idéologies islamistes radicales. Ce geste a ensuite été repris par Daesh à partir de 2014, qui y a ajouté l’affirmation “We are one”.

De l’islamisme au Gud

Thomas Pierret, chercheur et spécialiste du monde arabe au CNRS-IREMAM, explique que le geste du “doigt index pointé vers le ciel” est vraisemblablement un symbole de “ralliement à l’islam”. Tout porte à croire que l’utilisation de ce geste par les membres du Gud, repéré dans des dizaines de photos depuis leur retour en novembre 2022, soit un “signe de soutien aux idéologies islamistes”, mais dans sa forme la plus radicale, voire même terroriste.

Le choix de ce geste par le Gud, se pose sur l’idée que le “terrorisme”, associé aux islamistes radicaux, plus concrètement à la branche armé de l’Hamas ; les Brigades Izz al-Din al-Qassam, pourrait être considéré comme une “stratégie militaire” susceptible d’être utilisée en Europe par des groupes nationalistes blancs en vue de leur propre révolution. Ainsi, malgré leurs différences idéologiques, ces deux blocs se rejoignent sur le plan des “pratiques et des desseins”, partageant un objectif commun de défense territoriale et idéologique.

Sous un angle antisioniste, voire antisémite, le Gud s’est toujours positionné aux côtés des Palestiniens. Encore aujourd’hui, ces militants prennent des photos avec le drapeau palestinien. Il est important de rappeler qu’en 1993, à l’occasion des 25 ans du Gud, plusieurs affiches ont circulé dans la capitale : « À Paris, comme à Gaza, intifada ». Dans les années 2000, en réaction à une déclaration de Jospin accusant le Hezbollah de terrorisme, sur une affiche on pouvait lire : « Sionistes assassins, Jospin complice ». Le Gud exprimait ainsi son soutien au Hamas ainsi qu’au Hezbollah. Cette tendance, partagée à l’époque par le Bloc identitaire, est rappelée par l’historien Nicolas Lebourg. «Le Bloc identitaire est né des cendres d’Unité radicale, qui faisait l’apologie de Ben Laden et des kamikazes palestiniens. »

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Affiches du GUD : 1993 – 2000, et action de tractage à Paris 2023.

La “révolution conservatrice”, concept tout aussi réactionnaire que la charia

Entre les années 2000 et aujourd’hui, le Gud a connu trois périodes d’inactivité.

En octobre 2022, lors d’un hommage à deux militants grecs d’Aube Dorée, le groupe a annoncé son retour. Sur le fil de son compte Telegram, parmi ses premières publications, le Gud a invité ses abonnés à rejoindre un autre canal : Cercle Oswald Spengler, créé également en novembre. Oswald Spengler était un philosophe allemand controversé pendant le nazisme, mais ses écrits continuent d’exercer une influence significative au sein des mouvements nationalistes. Selon lui, la civilisation occidentale est en décadence. Spengler propose ainsi une révolution conservatrice, éloignée des valeurs républicaines et de la démocratie. Sur ce canal Telegram, on peut trouver plusieurs publications faisant référence au fascisme, aux Brigades Al-Qassam (la branche militarisée du Hamas) et à des citations qui flirtent avec le suprémacisme blanc. Sur ces publications sur les réseaux sociaux, le Gud partage aussi des posts sur la Palestine et l’Irak, mais aussi concernant Bashar al Assad et Parti Social-Nationaliste Syrien, créé en 1932 à Beyrouth sur le modèle des jeunesses hitlériennes.

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Logo du GUD et du Cercle Oswald Spengler telecherché de leurs profils Telegram.

Cette “révolution conservatrice”, en plus de sa dimension violente, constitue le fondement idéologique qui attire le GUD vers l’islamisme radical. En creusant davantage, on découvre que la “révolution conservatrice” est un concept aussi réactionnaire que la charia. Le GUD n’est pas le seul groupuscule d’extrême droite à vouloir adopter cette “révolution conservatrice”. Cette forme d’intégrisme politique est de plus en plus partagée par une partie du mouvement nationaliste français, comme en témoignent les hommages rendus par plusieurs groupuscules d’extrême droite à Dominique Venner, cofondateur du Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE). Avant de se suicider, Dominique Venner avait exprimé le souhait de créer l’Institut Iliade. Dix ans après sa mort, dans le programme prévu par l’institut pour le colloque qui devait avoir lieu le 21 mai 2023, interdit par la préfecture, l’une des thématiques était : “Pour une nouvelle révolution conservatrice”.

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Tweet du Gud – Affiches de l’Institut Iliade – Graffitis : Lyon Populaire – Helix Dijon,  21 mai 2023. 

Cette révolution conservatrice, une idéologie qui gagne du terrain au sein de l’extrême droite française, s’enracine davantage en raison de ses valeurs réactionnaires. Cependant, les aspects les plus préoccupants sont ceux qui attirent l’attention du GRECE et de l’institut Iliade, notamment le suprémacisme blanc. En d’autres termes, il s’agit de l’idée selon laquelle l’Europe doit s’opposer au grand remplacement, préserver sa culture et imposer une nouvelle hégémonie blanche.

L’index pointé vers le ciel, le Gud embrasse la tendance accélérationniste

Le Gud est un groupuscule connu pour sa violence, comme en témoignent ses actions au cours des dernières décennies. Plusieurs de ses membres ont été condamnés et certains ont même été emprisonnés. Aujourd’hui, le Gud est à un tournant de son existence. La dissolution de Génération Identitaire ainsi que des Zouaves de Paris a contraint le groupuscule à revoir ses fondements idéologiques et à revenir à ses racines : le nationalisme révolutionnaire. Cependant, il semble adopter une forme particulièrement plus radicale et antisémite, nourrissant des fantasmes qui s’assimilent au terrorisme islamiste, mouvance connue sous le nom de “Jihad blanc” de l’anglais “White jihad”.

Sur la question du geste de l’index pointé vers le ciel. Selon l’historien Nicolas Lebourg, le Gud a “toujours exprimé son soutien envers les Palestiniens, le Hamas et plus récemment vers Bashar al-Assad”. Il explique que le Gud est historiquement “antisioniste” et “anti-impérialiste”. L’appropriation de ce geste par le Gud, pour Nicolas Lebourg, est certainement associée à une forme d’approbation envers des méthodes de lutte utilisées par des “islamistes” en Palestine, bien que cela se traduise chez le Gud, sous une forme idéologique et fantasmatique de “terrorisme identitaire”.

Nadia Sweeny, journaliste chez Politis, spécialisée dans le “Jihad blanc” a abordé à plusieurs reprises la question de la radicalisations de nationalistes blancs. N. Sweeny, explique que “l’utilisation du geste “doigt levé vers le ciel” est utilisé au moins depuis 2015 par des “loups solitaires” comme Logan N., militant d’extrême droite qui prônait le « djihad blanc », condamné à 9 ans de prison pour association de malfaiteurs terroriste” en 2022.

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Les « loups solitaires » d’Atomwaffen Division – POLITIS • 23 mars 2022

Logan N. est “passé par les Jeunesses Nationalistes, le Front national, le Parti de la France et l’Action française. N. détaillait par le menu comment faire basculer le pays : lancer la « reconquête de secteurs » par des commandos « nationalistes », afin d’installer « un État parallèle ». « En prenant certaines villes moyennes, l’économie de l’État va s’écrouler. Tu laisses faire le travail. » Et puis, « si t’as plusieurs villes, ça bougera : c’est ce qu’ont fait les jihadistes en Irak ».”

Nadia S. affirme que le “white djihad ou Djihad blanc”, est une tendance “issue des États-Unis. Plus précisément du groupe terroriste néonazi Atomwaffen Division, créé en 2015”. Cette mouvance arrive aussi en France, et comme aux États-Unis, elle s’exprime dans les réseaux sociaux à travers une pensée confuse, qui entremêle le néonazisme et l’islamisme :  “des néonazis et islamistes radicaux se retrouvent aussi autour d’un antisémitisme profond sur fond de théorie du complot. Les deux mouvances répandent l’idée que les États-Unis, et par conséquent le monde, seraient contrôlés par une élite juive obscure, émanation de l’État d’Israël. C’est pourquoi, au lendemain des attentats du 11 Septembre, une frange néonazie américaine a clairement soutenu Ben Laden.”.

Le GUD semble manifestement vouloir renouer avec ses racines nationalistes révolutionnaires et face aux échecs des dernières décennies, il cherche à unifier le mouvement et à embrasser une voie plus radicale. Selon l’historien Nicolas Lebourg, spécialiste des extrêmes droites, cette voie pourrait effectivement être influencée par le courant “accélérationniste”, qui préconise une guerre culturelle où le concept de “Jihad blanc” s’enracine dans l’imagination et les gestes des militants.

Le “doigt levé”, les gudards unis contre le “grand remplacement”

Ce geste n’est pas anodin, il marque un positionnement clair des militants du Gud et signale un forme de radicalisation. Après que Daesh ait popularisé le geste du “doigt levé vers le ciel”, l’Atomwaffen Division, aussi fascinée par le terrorisme islamique, a détourné ce geste à des fins idéologiques. Plus concrètement, ils concevaient le terrorisme comme un moyen de préserver la supposée “race et culture blanche” et de contrer ce qu’ils perçoivent comme le “grand remplacement”. Plusieurs terroristes qui ont mené des tueries de masse ces dernières années se sont appuyés sur cette fausse théorie pour justifier leurs actes.

Le Gud adopta ce geste à des fins similaires, cherchant ainsi à s’inscrire dans cette prétendue “guerre culturelle”. Il prétend “défendre l’Europe” et protéger ce qu’il considère comme la supposée “race blanche” contre l’influence du multiculturalisme et une supposée “invasion migratoire”.

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Tweet du Gud – 17  mars 2023. 

La porosité entre l’extrême droite américaine et française est un phénomène avéré. De plus, pour les groupuscules plus radicaux tels que le GUD, leur assimilation à tendance “accélérationniste” suscite dans le mouvement une ligne très racialiste et en quête de préparation à cette «guerre civile raciale» qui viendra inéluctablement. Les Active Clubs, mouvement aussi issu des États-Unis et récemment arrivé en France, vient renforcer cette tendance.

Les Active Club ont été créés par Robert Rundo en 2020 et promeuvent la théorie du “grand remplacement”, complot construit au tour la destruction imminente de la race blanche également appelée “génocide blanc”. Des membres du Gud, ainsi que de la Jeunesse Boulogne, Auctorum, Luminis, etc., sont associés à l’Active Club parisien. Avant leur retour en novembre 2022, le geste de l’index pointé vers le ciel était déjà utilisé, au moins depuis le mois de mars, par des combattants de MMA nationalistes, des militants de Schaf crew Bourges Aurelianorum Corda, Jeunesse Boulogne, Jeunesse Angevine, OuestCokins, Mob Guignol Squad, etc. Cela soulève la question d’un éventuel lien entre les militants du Gud et les combattants actifs dans les sports de combat.

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Photo de combattant MMA France-OuestCasual – Photo de groupe Muai Thay Gala – Jeunesse boulogne – 2022 

Dans la même ligne des Active Club américains, obsédés par le suprémacisme blanc, le néonazisme et le graffiti, les Active Club français suivent la même vague. Au-delà que plusieurs de leurs membres portent des symboles nazis, ce même geste a été repéré dans l’image suivante, partagée en janvier 2023 par les graffeurs néonazis du collectif La Cagoule.

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 Affiche de l’Active Club – Graffiti néonazi “Sieg Heil et le geste de l’index” du collectif La Cagoule, 2023. 

La présence de symboles nazis parmi les nationalistes révolutionnaires n’est pas nouvelle. Le “national socialisme” a joué un rôle dans l’essor des mouvements fascistes, en particulier dans les pays qui ont collaboré avec le Troisième Reich. Ainsi, il n’est pas surprenant de voir plusieurs membres du Gud arborer des tatouages nazis, dont le plus connu est Logan Djian, avec un tatouage représentant le blason de la division Charlemagne, un bataillon de la Waffen-SS. La croix celtique, également un symbole du Gud, est devenue aujourd’hui un symbole néofasciste et suprémaciste blanc, déjà utilisé par les nazis et des collaborateurs français.

Pour conclure, le groupe Gud est de retour avec de nouvelles actions et un nouveau symbole : l’index pointé vers le ciel. Ce geste, associé au terrorisme, corrobore un glissement envers cette idéologie appelée le Jihad blanc, moyen que selon les militants du Gud, mais aussi d’autres groupuscules d’extreme droite française, serait une options stratégique pour imposer une hégémonie blanche en Europe. Le Gud cherche à radicaliser ses actions et à promouvoir une vision de la supposée “race blanche” contre le multiculturalisme et l’immigration, se rapprochant de la tendance accélérationnistes anti “grand remplacement” et ultra-violente.

Je tiens à exprimer ma gratitude envers Thomas Pierret, Nicolas Lebourg et Nadia Sweeny pour leur disponibilité en tant qu’interviewés.