Le skinhead David Beaune a été condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle

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David Beaune n’est pas parvenu à convaincre ses juges. Dans la soirée du vendredi 12 décembre, les jurés de la cour d’assises de Seine-Maritime l’ont reconnu coupable du meurtre d’Imad Bouhoud, un jeune beur âgé de dix-neuf ans, le 18 avril 1995, et l’ont condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle. Il écope ainsi de la même peine que celle infligée à Mickaël Gonçalves, son comparse, jugé pour les même faits, le 4 juillet, par le tribunal de Braga, au Portugal. Les deux jeunes hommes s’accusaient l’un l’autre de la responsabilité du meurtre d’Imad Bouhoud, mort noyé dans les eaux du bassin Vauban, au Havre.

Dans son réquisitoire, l’avocat général Jean-Louis Lecué a souligné qu’« il est fondamental de dire haut et fort que David Beaune a commis un meurtre raciste », et a demandé à la cour de lui infliger une peine de vingt ans de réclusion criminelle. Me Jean-Michel Vincent, avocat de l’accusé, a, pour sa part, mis en avant l’histoire difficile de David Beaune. Abandonné à l’âge de deux ans par ses parents, « il avait besoin d’une autre famille », a-t-il notamment suggéré.

A l’énoncé du verdict, David Beaune n’a pas paru surpris. Avant que la cour ne se retire pour délibérer, il a une dernière fois pris la parole, affirmant ne pas réclamer « la clémence » de ses juges. Plus tôt dans la journée, il avait déjà dit : « Je vais m’expliquer sur les faits. Je suis là pour assumer mes actes. » Une stratégie différente de celle adoptée jusque-là. A l’ouverture du procès, David Beaune était, en effet, apparu borné, presque arrogant, quand il revendiquait à la barre son appartenance au mouvement skinhead et son attachement aux idées racistes et xénophobes (Le Monde du 11 décembre). Cette attitude suicidaire augurait mal de la suite. Pourtant, au fil des audiences, l’accusé avait modulé son propos, allant même, au soir du premier jour, jusqu’à adresser des excuses à la famille de la victime.

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A l’ouverture du troisième et dernier jour d’audience, David Beaune a pris toute sa part de responsabilité dans la mort d’Imad Bouhoud. Bien sûr, de nouveau il affirme ne pas avoir poussé le jeune beur dans le bassin Vauban. « C’est Mickaël Gonçalves qui l’a fait, alors que je retenais Imad par le col de son blouson », précise-t-il. Le président Jean Reynaud s’étonne alors que l’accusé n’ait jamais formé de demande de mise en liberté. « Vous considérez-vous coupable de quelque chose ? », a-t-il demandé. « Oui, de complicité de meurtre. » « Pourquoi ? » « Parce que j’ai lâché Imad Bouhoud. » « Au début, ajoute-t-il, j’avais bien la haine. La prison a alimenté cette haine. Maintenant, c’est comme des regrets, j’essaie de trouver quelqu’un pour me sortir de ça. »