Le PNFE, groupuscule néonazi français

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«France d’abord, blanche toujours»: depuis sa création en 1985, le Parti nationaliste français et européen(PNFE) n’a pas changé de programme. Le principal groupuscule néonazi français, que des rumeurs donnent pour dissous, s’arc-boute sur les thèses du racisme biologique, abhorre la démocratie et le capitalisme cosmopolite. Il a fait du «lobby juif mondial» son ennemi obsessionnel, comme en témoigne la lecture de sa revue le Flambeau. Ancien du Front national et de l’OAS, le fondateur et «idéologue» du mouvement, Claude Cornilleau, a laissé la présidence à Eric Sausset du groupe Thor de Saint-Lo (Manche), pour des activités commerçantes ou commerciales?

Au milieu des années 80, Cornilleau a su attirer les militants nationalistes frustrés par «l’embourgeoisement et le parlementarisme» du FN. Le manque de dynamisme d’autres groupuscules de l’extrême droite révolutionnaire néonazie lui a ouvert l’espace qu’occupait, à la fin des années 70, l’ex-Fane (Fédération d’action nationale et européenne) de Marc Frédériksen c’est les bons accents? ­ qui a rejoint le PNFE avec une dizaine de militants. Adepte du marketing et de la communication, il a su donner à ses troupes le style et le ton qui manquaient aux concurrents : tenues de parade copiées sur celle des SA (sections d’assaut nazies), chants hitlériens, congrès événement, comme en 1989 au château de Corvier. Surtout, quand le phénomène s’est développé, Cornilleau a fait la cour aux skins rétifs aux longues séances d’endoctrinement mais amateurs de musique oï (rock des skinheads, ndlr), de bière et de bastons avec les «bronzés». De toutes origines. Résultat: à son apogée, vers 1990, le PNFE compte plusieurs centaines de sympathisants dans toute la France. Il adopte une structure extrêmement décentralisée. Les sections locales sont très autonomes, ont leur fanzine. Le PNFE s’implante dans le Nord, l’Ouest et le Sud-Est. Avec ses milliers de rapatriés, ses nouvelles populations ultrasécuritaires, les problèmes de chômage et de racisme, la Côte d’Azur est un vivier de militants. Et un joli terrain d’actions. Cornilleau et ses amis seront lourdement soupçonnés d’avoir, au minimum, inspiré les attentats commis en 1988 contre des foyers Sonacotra de Cagnes-sur-Mer, par une bande de Pieds Nickelés sympathisants ou militants du mouvement. Malgré l’avis du parquet de Grasse, la chambre d’accusation de la cour d’appel d’Aix-en-Provence ne retiendra pas leur responsabilité.

On avait pu, alors, vérifier les tentatives réussies d’infiltration du monde policier, notamment à travers l’ultradroitière Fédération professionnelle et indépendante de la police (Fpip).

Depuis peu, le PNFE semblait en panne, déchiré par les traditionnelles querelles groupusculaires. Il est à son tour dépassé sur sa droite par une kyrielle de sous-groupuscules se voulant encore plus hétérodoxes, plus skins, plus blancs. C’est le cas des Charlemagne Hammer Skins, dont on parle beaucoup à propos des auteurs de la profanation de Carpentras. Branche française autoproclamée de la Nation Hammer Skin, le groupe est dirigé par un skin marseillais, Hervé Guttuso, tombé amoureux des suprématistes blancs américains lors d’un séjour aux Etats-Unis. Il possède un site Internet et la boîte postale de son fanzine, 14 Mots, Bulletin de liaison des authentiques Aryens révolutionnaires, est domiciliée à Saint-Maries dans l’Idaho, fief des milices américaines d’extrême droite les plus radicales. On peut y lire, entre autres perles: «La Torah interdit aux juifs la pratique de la sodomie. Etonnant de la part d’un peuple qui encule le peuple blanc depuis des millénaires.» Comme le PNFE et la plupart des organisations néonazies, Guttuso est très surveillé par les services de police. Il avait été entendu pour des menaces proférées contre la famille de Patrick Gaubert, l’ancien conseiller de Charles Pasqua .