Deux ans de prison pour un crime

Jugement des assassins de Frédéric Bourget

Dans la nuit du 1er au 02 août 2009, Frédéric Bourget était agressé par trois skins d’extrême droite, devant le bar le Tiffany’s, quartier Jeanne d’Arc, à Rennes.1 Le jugement a été rendu.2

Finalement, l’affaire aurait presque pu passer inaperçue, tant le traitement médiatique qui avait eu cours à l’époque des faits était parcellaire et évasif. La nature de la violence qui avait présidé à cette agression était pourtant si évidente que certains des accusés (aujourd’hui complètement coupables) s’étaient fendus de pathétiques défenses de profil dans divers journaux, cherchant à minimiser la nature profonde de l’idéologie (fut-elle celle qu’on trouve au fond d’une pinte de bière) qui les animait.

Ce crime s’ajoute à une liste trop lourde pour être ignorée dans ce qu’elle a de politiquement réel : l’extrême droite tient la violence comme une valeur, un rite d’accomplissement, et même un moyen d’exister. On n’est pas skinhead d’extrême droite sans avoir pour but dans la vie le tabassage d’immigrés ou de gauchistes, à trois contre un dans le cas présent. On ne met pas de coups de docs dans la tête d’un individu qu’on estampille comme « sale gauchiste » par hasard. Il est effarant de constater à quel point le volet « politique » de l’affaire passe pour un « folklore » dans les médias et devant une cours de justice, mais également chez un tas de partis politiques habituellement très prompts à communiquer.

A l’heure exacte où des inculpés d’Aulnay-sous-Bois prennent du ferme pour des délits imaginaires, au jour ou une poubelle qui brûle déclenche une avalanche de « dénonciations outrées »…des nazis qui tuent prennent deux ans. Il ne s’agit même pas ici de réclamer une forme de « justice » dans la justice bourgeoise, mais de noter à quel point la motivation d’extrême droite passe presque pour une « circonstance atténuante », un synonyme de « à l’époque j’étais pas bien dans ma peau », et à quel point le silence politique autour de cette affaire est inquiétant.

L’extrême droite doit être combattue pour ce qu’elle est : une entreprise meurtrière !

  1. Michel Tanneau, « Les skinheads avaient cogné, un homme était mort « , Ouest-France, 30 décembre 2009. Lire ici : http://www.rennes.maville.com/actu/actudet_-Les-skinheads-avaient-cogne-un-homme-etait-mort-_loc-1208678_actu.Htm []
  2. « Rennes. Trois ex-skinheads condamnés pour des coups mortels « , Ouest-France, 03 février 2017. Lire ici : http://www.ouest-france.fr/bretagne/rennes-35000/rennes-trois-ex-skinheads-juges-pour-des-coups-mortels-4778393 []
https://lahorde.samizdat.net/deux-ans-de-prison-pour-un-crime

Une des trois personnes emprisonnées pour coups mortels sur un jeune homme de 27 ans,le 2 août dernier, demandait sa mise en liberté hier. Décision aujourd’hui.

Un Rennais de 27 ans avait été retrouvé mort, le samedi 2 août dernier au matin, dans ce passage situé près de l’avenue Sergent-Maginot

Digne de bout en bout, la famille de Frédéric Bourget était présente, hier, devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes. Ce chauffeur-livreur de 27 ans avait été retrouvé mort à 6 h 49, le samedi 2 août dernier, avenue Sergent-Maginot. « S’il avait été secouru plus rapidement, il aurait eu des chances de survie », a conclu le médecin-légiste.

Pour une cigarette refusée…

Ce vendredi 1er août, le jeune homme faisait la fête en ville, avec des copains. Mais il a eu la malchance de croiser un groupe de skinheads venus de région parisienne, dans un bar proche de la rue de Paris. Enivrés au chouchenn, « ils ont fait le salut nazi à l’intérieur du bar », rappelle un magistrat.

Puis, ils ont demandé une cigarette à Frédéric Bourget. Celui-ci a refusé. Il s’est fait taxer de « sale gauchiste », de « red » (« rouge », en anglais). Trois des skinheads l’ont frappé à coups de poings. Puis à coups de pied, lorsqu’il était à terre. Des témoins le confirment.

Il était environ 3 h. Blessé, Frédéric Bourget a pourtant rejoint ses amis, dans un appartement du quartier Alphonse-Guérin. Pourquoi personne n’a-t-il appelé les pompiers ? Vers 5 h, le jeune homme a dit à ses copains qu’il ne se « sentait pas bien », qu’il avait « des maux de tête ». Il a quitté l’appartement. Et il est mort dans la rue.

Une enquête difficile

« Il est décédé d’un syndrome asphyxique, dû à de nombreuses lésions traumatiques au crâne », a révélé l’autopsie. Un hématome sous-dural, qui dégénère en hémorragie interne ? C’est l’explication plausible.

L’enquête de la PJ a abouti deux mois plus tard, début octobre, à l’interpellation de trois skinheads : Nivine Gaid, une femme de 21 ans ; Romain Renoux, 23 ans, et un mineur de 17 ans. Une juge les a mis en examen pour « violences volontaires ayant entraîné la mort, sans intention de la donner ». Autrement dit pour coups mortels, un crime passible de la cour d’assises.

Incarcérés, Romain Renoux et le skinhead mineur auraient, selon un magistrat, « reconnu avoir frappé la victime, mais pas dans la tête ». Nivine Gaid, elle, avoue avoir donné « le premier coup de poing, c’est tout. » Pour son avocat, Me Pierre-Ann Laugery, « il est difficile d’établir avec certitude le lien entre ces coups vers 3 h, et la mort quatre heures plus tard, sans qu’on sache précisément ce qu’il s’est passé entre-temps ». Le procès promet d’être disputé.

Décision ce matin

En attendant, Nivine Gaid demandait sa mise en liberté provisoire, hier devant la chambre de l’instruction. « J’étais en rupture avec ma famille, je m’en cherchais une, je me suis retrouvée chez les skinheads alors que je ne suis pas raciste », a-t-elle expliqué hier entre deux sanglots, la tête tournée vers la famille de la victime. « Elle est tombée chez les skinheads, comme elle aurait pu tomber chez les punks, a plaidé Me Laugery. Aujourd’hui, son père est prêt à la reprendre dans sa pizzeria, en région parisienne ».

Comme la juge d’instruction et le juge des libertés, l’avocate générale s’oppose à la remise en liberté de la jeune femme. Décision de la chambre, ce matin.

https://rennes.maville.com/actu/actudet_-Les-skinheads-avaient-cogne-un-homme-etait-mort-_loc-1208678_actu.Htm

 

Michel TANNEAU.   Ouest-France  

Rennes. Trois ex-skinheads condamnés pour des coups mortels

La soirée s’était mal terminée, en août 2009, dans un bar de Rennes. Un jeune de 27 ans avait succombé à ses blessures. Les suspects appartenaient à la mouvance d’extrême droite. Jugés par la cour d’assises depuis mardi, ils ont été condamnés à des peines comprises entre quatre et cinq années de réclusion, assorties de sursis.

Ce 1er août 2009, Frédéric Bourget fait la fête dans un bar de la rue Paul-Bert, à Rennes. Le chauffeur livreur de 27 ans est abordé par une jeune femme, Nivine Gaid, 28 ans aujourd’hui, qui lui demande une cigarette. Elle n’obtient pas satisfaction. Romain Renoux, 30 ans, et un complice mineur, le tabassent en le traitant de « sale gauchiste ».

Une fois à terre, il reçoit des coups de poing et des coups de pied. Un des agresseurs porte des chaussures coquées, affectionnées par les skinheads. Les deux hommes, dont un est mineur, et la femme, appartiennent à la mouvance d’extrême droite. Tous les témoins affirment qu’ils ont fait le salut nazi dans le bar…

Mort sur le trottoir

Sonné, Frédéric Bourget parvient à reprendre ses esprits et poursuit la soirée dans un appartement chez des amis, rue Alphonse-Guérin. Deux heures plus tard, il se plaint de maux de tête et veut rentrer chez lui.

Un employé du Star (réseau de bus et métro) l’aperçoit peu avant 7 h du matin, le 2 août, allongé sur le trottoir avenue du Sergent-Maginot. Le jeune homme est mort. L’autopsie révèle que le décès a été provoqué par une hémorragie du cerveau, suite à des coups violents.

Ils encouraient quinze ans

Les trois accusés ont été placés, après les faits, pendant sept à huit mois en détention provisoire. Ils étaient, depuis plus de sept ans, sous contrôle judiciaire et ont eu le temps de se réinsérer.

Les trois anciens skinheads, qui disent avoir quitté la mouvance d’extrême droite après leur incarcération, encouraient quinze ans de réclusion criminelle.

Condamnés

Nivine Gaid et Romain Renoux ont été condamnés à cinq ans, dont trois avec sursis. Le troisième accusé, mineur au moment des faits, écope de quatre ans de réclusion, dont deux avec sursis.

Tous ont été conduits en détention, aussitôt le verdict prononcé.

https://www.ouest-france.fr/bretagne/rennes-35000/rennes-trois-ex-skinheads-juges-pour-des-coups-mortels-4778393